Posture respectueuse (école alternative sans violence)

L’apprentissage coopératif

La pédagogie coopérative est une appellation très vaste qui regroupe diverses méthodes et applications liées aux apprentissages scolaires. Elle est née des travaux de plusieurs chercheurs américains en psychologie sociale. Un des pédagogues les plus connus en faveur de ce système était en revanche français : Célestin Freinet.

L’intérêt principal de la pédagogie coopérative est en effet de placer l’élève dans une position active, plutôt que passive – l’enfant ne subit plus les apprentissages sans pouvoir y participer, il en devient véritablement acteur.

Cette pratique correspond à une approche éducationnelle plus respectueuse de l’enfant. Son objectif affiché est d’optimiser les apprentissages et d’aider à développer diverses compétences importantes chez les élèves.

Généralement, l’application de la pédagogie coopérative implique de faire travailler les élèves par petits groupes, avec un objectif commun. On considère comme travail en groupe toute démarche qui réunit au moins 2 personnes. D’abord appliqué essentiellement durant les 1ères années d’école, ce mode de travail est aujourd’hui largement plébiscité, y compris par les textes officiels de l’EN – ainsi, le B.O. spécial n°11, du 26 novembre 2015, parlait d’ « interagir de façon constructive avec d’autres élèves dans un groupe pour confronter des réactions ou des points de vue ». Les apprentissages collaboratifs peuvent être mis en œuvre à tous les niveaux, aussi bien en maternelle qu’en ateliers de formation pour adultes.

Néanmoins, comme souvent la pratique sur le terrain ne suit pas forcément les recommandations légales. Les enseignants réfractaires aux travaux coopératifs restent nombreux aujourd’hui dans le paysage scolaire français, influencés notamment par les données très ancrées d’un système ultra-compétitif, où la notation et les évaluations privilégient l’individualisme, ainsi que par les échecs relatifs de certaines expériences coopératives (et ce, bien qu’elles soient loin d’être majoritaires).

Quels sont les avantages des travaux coopératifs ?

Le fait que les élèves soient en petits groupes favorise :

  • l’intervention de chacun. Là où, en classe, nombre d’élèves se fondent dans la masse silencieuse et sont laissés de côté, le fait d’être en petits groupes donne aux élèves en retrait beaucoup plus de chance de pouvoir exprimer leur point de vue et/ou leur.s questionnement.s, et d’être entendus et écoutés. Participer permet à chaque élève de légitimer sa place dans un groupe, et renforce le sentiment d’appartenance. Or, précisément, les neurosciences ont montré qu’une bonne estime de soi ainsi que le sentiment d’appartenance sont des atouts majeurs dans le processus d’apprentissage 
  • les interactions entre élèves, et le partage : d’informations, de ressources, de compétences, de vocabulaire, d’expériences, d’idées, etc., ce qui renforce le sentiment d’appartenance au groupe, ainsi que les apprentissages, à-travers la stimulation cognitive 
  • un temps d’écoute plus adapté pour l’adulte encadrant : en circulant entre les groupes, il.elle peut ainsi écouter chacun, repérer les difficultés, les centres d’intérêt, etc. 
  • la discussion : ce qui permet de développer l’entraide, l’encouragement, l’amélioration, la co-construction 
  • le climat global de la classe : il est plus apaisé, chacun se sentant de fait plus respecté dans son individualité. Un climat apaisé est bien entendu plus favorable aux apprentissages qu’une tension permanente 
  • le développement des aptitudes sociales et relationnelles de chacun 
  • l’introduction dans la classe d’un autre système de transmission des connaissances. L’enseignant n’est plus l’unique pourvoyeur d’informations : on passe ainsi d’un système de transmission vertical à un système horizontal, plus respectueux des individus, et de ce fait plus enthousiasmant 
  • le développement de l’autonomie des élèves 
  • l’esprit d’entraide.

Préparer les élèves aux travaux coopératifs

Nous l’avons évoqué au début de cet article : le système scolaire français, par essence, ne favorise pas l’usage des travaux coopératifs. Au contraire, le système de notation ainsi que les évaluations impliquent un esprit de compétition : le « chacun pour soi » s’oppose alors à la collaboration.

De fait, il est essentiel que l’enseignant qui choisit de se tourner vers les travaux coopératifs y prépare ses élèves. L’esprit global de son enseignement pourra ainsi être modifié :

  • en premier lieu, en choisissant de faire confiance à ses élèves, en acceptant de déléguer certaines responsabilités et de se placer en position de retrait afin de favoriser la prise de parole et les interventions des élèves. Ce point est particulièrement important : les élèves, se sentant investis d’une nouvelle responsabilité personnelle, se sentent ainsi valorisés et responsables de leurs apprentissages – ce qui accroît significativement leur motivation, et généralement aussi la mémorisation 
  • en choisissant (par exemple) d’insister sur le développement des compétences plus que sur leur mise en avant à titre individuel, l’enseignant pourra insuffler dans sa classe un esprit d’équipe, et des valeurs plus positives et plus collectives (comme l’intérêt du travail d’équipe) 
  • enfin, l’enseignant veillera à proposer ses ateliers de manière à ne pas permettre de réalisation individuelle, mais au contraire en impliquant la nécessité d’une contribution collective. L’interdépendance est en effet un des éléments clés de la pédagogie coopérative : chacun arrive à ses objectifs dans la mesure où les autres membres du groupe y parviennent aussi. Tous les individus impliqués sont responsables du groupe auquel ils appartiennent.

Comment prolonger l’expérience des travaux coopératifs

Lorsque les ateliers coopératifs seront mis en place, l’enseignant pourra aussi contribuer à renforcer ces nouvelles modalités de groupe, notamment en mettant en valeur les interventions de chacun. Il pourra également reprendre des questions soulevées lors des ateliers. Ces éléments très positifs renforceront l’attention des élèves, qui se sentiront écoutés et gagneront encore en confiance et en motivation.

Afin d’améliorer les ateliers coopératifs qui suivront, il est souvent recommandé de demander aux élèves de juger de la qualité du ou des atelier.s précédent.s : c’est le temps de l’objectivation. Cela peut se faire par l’intermédiaire d’un QCM à remplir de manière anonyme, par exemple. Ces interrogations objectives permettront de revenir sur l’expérience de l’atelier coopératif, à titre individuel puis à titre collectif – perpétuant de fait l’usage des compétences relationnelles et cognitives requises dans un système collaboratif. 

Ainsi, il pourra être demandé aux élèves :

  • ce qu’ils ont pensé de ce mode d’atelier
  • comment ils ont jugé leur intervention au sein du groupe
  • ce qui, selon eux, pourrait être amélioré
  • ce qu’il ne faut pas reproduire lors de prochains travaux du même type
  • quelles compétences cela leur a permis d’utiliser
  • ce qu’ils en ont retenu, etc.

Principaux points faibles de la pédagogie coopérative

Un des principes fondateurs de la pédagogie coopérative est l’hétérogénéité du groupe. En effet, l’idée de départ était de créer des groupes diversifiés, réunissant garçons et filles, enfants d’âges et de niveaux socio-culturels différents. L’objectif était que chacun puisse interagir en fonction de ses caractéristiques individuelles, enrichissant ainsi le groupe par la diversité. Or, il est apparu via plusieurs études de résultats que les groupes hétérogènes favorisaient souvent la domination d’un ou de quelques individus sur les autres. Les élèves défavorisés notamment se retrouvaient ainsi parfois encore plus écrasés qu’en classe.

Pour cette raison, qui va totalement à l’encontre des objectifs de la pédagogie coopérative, le consensus est désormais à la désignation de groupes plus homogènes – ainsi, il est couramment accepté que l’enseignant nomme lui-même les membres de chaque groupe, plutôt que d’en laisser le libre choix aux élèves – ceci afin de minimiser les risques de dérive relationnelle, et d’optimiser les résultats de la démarche.

Un autre problème potentiel causé par les principes des ateliers coopératifs est la prise de responsabilité : il peut parfois s’avérer assez délicat de garantir que chacun ait le même degré de responsabilité, et que l’un ne va pas prendre l’ascendant sur l’autre, reproduisant ainsi le schéma classique des relations verticales entre élèves et enseignants. Il appartient à l’adulte encadrant le projet coopératif de veiller à ce que l’égalité soit garantie, et que chacun soit respecté. 

En résumé, les points faibles de la pédagogie coopérative peuvent être facilement contournés, si la personne à l’origine du projet mis en place veille à ce que tout se passe dans les meilleures conditions possibles.

Pour terminer, notons que l’on parle aussi parfois d’apprentissages collaboratifs. Le principe global est le même, la nuance portant sur les compétences des intervenants : le groupe de travail réunit des personnalités disposant des mêmes capacités cognitives. De ce fait, les apprentissages collaboratifs s’adressent davantage à des individus ayant déjà développé certaines compétences et connaissances. D’autre part, le rôle de chacun au sein du groupe est plus flexible : plus qu’investi d’un rôle précis comme cela est le cas dans un atelier coopératif, l’individu impliqué dans un projet collaboratif est là pour apporter sa contribution, en fonction de ses compétences personnelles. Le projet collaboratif est donc moins structuré que le projet coopératif. Son objectif principal est de partager des connaissances non fondamentales (contrairement aux apprentissages coopératifs qui eux s’y rapportent), et éventuellement de les approfondir, de les réorganiser, ou encore de les enrichir.


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2 réflexions au sujet de “L’apprentissage coopératif”

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